Plastic bank : dépolluer et "ramasser l'argent". (#006)
Ramasser les plastiques et créer de la valeur avec ! C'est un sujet auquel veut s'attaquer Manao Manga. Voici un bel exemple de ce qui a pu être mis en oeuvre en Haïti... sans aucun doute un exemple à suivre !
Article issu de www.say-yess.com
Et si le plastique ramassé dans la nature avait une valeur? S’il devenait une monnaie, que les plus démunis pouvaient échanger contre ce dont ils ont besoin? C’est le pari qu’a lancé l’entreprise sociale « Plastic Bank » en Haïti.

Jonchant les trottoirs défoncés de Port au Prince, bouchant les canalisations ou enlaidissant les bords de mer, les déchets plastiques sont un fléau en Haïti. Mais depuis l’an dernier, dans certains coins du pays, se déroule un étrange ballet : des personnes démunies nettoient des zones entières et apportent les déchets par gros ballots dans de petits bâtiments surmontés de panneaux solaires. Ce sont les centres de collecte du programme « Ramas lajan » (« Ramasse l’argent »), mis en place par l’entreprise Plastic bank.
Né en 2013 dans la tête de deux Canadiens, Plastic bank transforme les déchets en monnaie d’échange. « Ils peuvent en obtenir de l’argent mais aussi des services. Contre 40 ou 50 bouteilles plastiques, un chauffeur de taxi pourra recharger son téléphone portable avec le panneau solaire, et donc travailler correctement malgré les coupures de courant », expose Sean Mc Millan, l’un des cadres de l’entreprise.
Le rêve, à terme, serait de donner une valeur aux 8 millions de tonnes de plastique qui finissent chaque année dans la nature (790 fois le poids de la Tour Eiffel !). « Si une bouteille plastique valait cinq dollars, elle ne finirait pas dans la rue ou dans la mer ! », assure Sean Mc Millan.
Jusqu’à 100 dollars de revenus par mois
Chacun des 26 centres de collecte haïtiens apporte un complément de revenu à une vingtaine de collecteurs de déchets – jusqu’à 100 dollars par mois, une petite fortune dans ce pays très pauvre. « Certains bénéficiaires n’avaient nulle part où dormir, d’autres pas de quoi se marier. Depuis la mise en place de « Ramas Lajan » leur vie a changé. Ils peuvent nourrir leurs enfants, les envoyer à l’école… », témoigne Johnny Atilus, un des chefs de collecte en Haïti.
Des centres de recyclage existent déjà dans le pays mais sont souvent excentrés et sans scrupules. « Les collecteurs de déchets ne peuvent pas négocier les prix avec les intermédiaires. Ils sont à leur merci », expose Sean McMillan. A terme, Plastic bank veut établir une sorte de commerce équitable des vieux plastiques, avec un prix d’achat correct et stable dans le temps.
« We want social plastic »
Le plus gros défi consiste à garantir des débouchés pour les dizaines de tonnes de plastique collectées chaque mois. La marque de cosmétiques Lush a déjà acheté des granules de plastique recyclé pour en faire des pots de crèmes, de gommages et autres produits de beauté. « Notre plastique n’est pas adapté pour des emballages alimentaires, car la température de stérilisation le ferait fondre », précise Sean Mc Millan.
Reste l’immense marché des produits d’hygiène personnelle ou d’entretien, l’univers des surfaces plastiques, comme les tapis de voiture ou les linos, et même l’industrie du vêtement, avec ses polaires ou ses jeans contenant des bouteilles recyclées. « Pour faire pression sur les industriels, nous avons lancé le mouvement « We want social plastic ». Plus d’un million de consommateurs soutiennent la démarche », signale Sean Mc Millan.
La société a même imaginé une machine pour fondre le plastique en longs filaments, utilisables ensuite dans une imprimante 3D. De quoi permettre aux collecteurs de créer leurs propres petits objets, à vendre ensuite 10 ou 100 fois plus cher que les déchets d’origine. Le projet est encore balbutiant mais David Katz, le visionnaire patron de Plastic Bank, est en convaincu : les déchets plastiques représentent, pour les plus pauvres, un véritable gisement de pétrole.
11 Décembre 2015
Hélène SEINGIER
Source : http://www.say-yess.com/2015/9692/plastic-bank-depolluer-et-ramasser-largent/